Allez au contenu, Allez à la navigation, Allez à la recherche, Changer de langue

Le Bilan

Carré musulman à Douaumont (Verdun)

Carré musulman à Douaumont (Verdun)

Sur les 180 000 combattants maghrébins mobilisés en Europe, 1 sur 7 ne reverra jamais la terre d’Afrique. C’est évidemment beaucoup trop mais ce n’est pas davantage que les français du continent, c’est autant. Contrairement à une idée reçue, les combattants d’Afrique du Nord comme ceux d’Afrique de l’Ouest n’ont pas servi de chair à canon pour épargner des vies européennes. Dans cette guerre, tous les combattants – les « frères de combat » - ont été égaux devant la mort et dans l’accomplissement de leurs missions. Evoquant ces combattants maghrébins, l’historien Gilbert Meynier constate que «  l’ordre militaire  leur parut plus égalitaire que l’ordre colonial ».

Il y eut en 1914 des révoltes en Algérie, principalement limitées à l’Aures et sévèrement réprimées, des mouvements nationalistes en Tunisie notamment, qui essayèrent d’utiliser le conflit pour faire valoir leurs revendications. Au Maroc, des combats territoriaux, sans lien avec la guerre qui se déroulait en Europe, se poursuivirent surtout dans le sud du pays. La France y maintint un contingent de 35 000 hommes. La crainte exista que l’Islam soude les combattants d’Afrique du Nord à ceux de l’empire Ottoman qui venait d’entrer en guerre aux côtés de l’Allemagne.

Mais l’appel à la guerre sainte du sultan Mehmed V lancée en novembre 1914 n’eut pas d’écho ou si peu.  Ainsi, par exemple, 3000 combattants d’Afrique du Nord faits prisonniers par les allemands refusèrent malgré la pression de s’engager dans l’armée turque. Le seul incident grave se déroula en décembre 1914 quand des tirailleurs algériens refusèrent d’aller sur le champ de bataille. Dix tirailleurs furent fusillés sur ordre de Foch.  L’historien Marc Ferro fait également état de quelques désertions dans le secteur de Verdun. Mais ces faits rapportés au nombre de combattants engagés font figure d’exceptions.

Ces combattants qui avaient traversé la Méditerranée pour venir combattre en Europefurent donc particulièrement loyaux et répondirent aux attentes de l’armée française.En raison de leurs qualités, réelles souvent, supposées parfois, on les engagea davantage dans les actions très offensives, quand il fallait prendre d’assaut une position. En revanche, ils furent moinsutiliséspour de longs séjours dans les tranchées, à subir sans broncher les bombardements de l’ennemi.

Leurs actions d’éclat leur valurent de nombreuses décorations. Seules la Légion Etrangère et le RICM (Régiment d’Infanterie Coloniale du Maroc), utilisés dans le même registre, furent plus décorés au cours de la Grande Guerre. Les régiments de tirailleurs marocains eurent au total 63 citations et tous reçurent la fourragère (au moins deux citations à l’ordre de l’armée). Le 2ème RTA reçut la Légion d’honneur et la Médaille militaire. A ce jour, ils ne sont que quatre régiments à avoir obtenu cet honneur.Les régiments furent honorés, les combattants également. De nombreux tirailleurs recevront la Légion d’Honneur pour leur courage au combat.

« Les derniers venus dans la famille… »

Dans son discours du 11 novembre 1918, Georges Clémenceau évoque«  les derniers venus dans la famille maisnon les moins chers, ces troupes d'Afrique, ces Marocains irrésistibles… ».

C’est un hommage appuyé à tous les militaires indigènes. Le Président du Conseil aurait souhaité que l’impôt du sang réclamé à tous les outre mer soit accompagné de la citoyenneté. Cette éventualité évoquée en temps de guerre restera un vœu pieu en temps de paix. Il n’y aura pas de réelle avancée dans ce domaine.En revanche, la loi du 31 mars 1919, qui encadre le régime des pensions et retraites pour les militaires mutilés ou malades et les veuves et orphelins de guerre, prévoit dans son article 73 « Les tarifs de pensions fixés pour les militaires français sont applicables aux militaires indigènes de l'Algérie et des colonies ou pays de protectorat dans lesquels le recrutement s'opère par voie de conscription ».Une fois de plus, le statut militaire était plus égalitaire que le statut colonial. De ce point vue, la France a été plus juste que les autres nations coloniales.

Le 5 juillet 1919, M. Raymond Poincaré, Président de la République, remets la Médaille Militaire au 2ème RTA. Télécharger ci-dessous le texte du décret.